L’expédition Franklin demeure l’une des énigmes maritimes les plus captivantes de l’histoire. Entre aventure humaine et mystère arctique, cette mission de recherche menée en 1845 par Sir John Franklin visait à découvrir le passage du Nord-Ouest. À bord des HMS Erebus et HMS Terror, l’équipage s’est aventuré dans les glaces du Canada arctique, ne laissant derrière eux que des questions sans réponses pendant près de deux siècles. Aujourd’hui, grâce aux efforts de Parcs Canada et de nombreux chercheurs, des fragments de cette histoire refont surface, offrant des indices sur le sort des hommes de Franklin. Plongeons au cœur de cette épopée glacée et des récentes découvertes qui intriguent encore les experts et passionnés.
La genèse de l’expédition Franklin
En 1845, l’Angleterre, sous le règne du roi Guillaume IV, aspire à cartographier les routes maritimes et asseoir sa suprématie navale. C’est dans ce contexte que l’expédition Franklin voit le jour. Sir John Franklin, vétéran des explorations polaires, est choisi pour diriger cette mission ambitieuse. Son objectif : trouver et cartographier le passage du Nord-Ouest, une route maritime supposée relier l’océan Atlantique à l’océan Pacifique à travers l’archipel arctique canadien.
Les navires choisis pour cette aventure, les HMS Erebus et HMS Terror, sont des bâtiments robustes, modifiés pour résister aux glaces arctiques. Ils sont équipés des dernières technologies de l’époque, comme des moteurs à vapeur et des coques renforcées. L’équipage se compose de 129 hommes, tous triés sur le volet pour leurs compétences et leur endurance.
Malgré les préparatifs minutieux, l’expédition se heurte rapidement aux rigueurs de l’Arctique. Les navires sont last seen à la sortie de la baie de Baffin en août 1845. Puis, c’est le silence radio. Le sort de l’expédition Franklin devient un mystère, alimentant les spéculations et les efforts de recherche pendant des décennies.
Les premières recherches et les découvertes macabres
Face à l’absence de nouvelles, Lady Franklin, l’épouse de Sir John, mène des campagnes infatigables pour retrouver son mari et son équipage. Plusieurs expéditions sont lancées pour percer le mystère. Parmi les plus importantes, celle de John Rae en 1854, qui rapporte des récits troublants d’Inuits sur des hommes blancs affamés et désespérés, et trouve des objets appartenant à l’expédition Franklin.
C’est en fait à l’île Beechey que l’on découvre les premières traces tangibles de l’expédition : trois tombes d’hommes de l’équipage, datées de l’hiver 1845-1846. Ces découvertes révèlent les conditions extrêmes et les souffrances endurées par les marins. Les autopsies réalisées par le docteur Owen Beattie dans les années 1980 sur ces corps étonnamment bien conservés montrent des signes de malnutrition, de saturnisme (empoisonnement au plomb) et possiblement de cannibalisme.
Les récits des Inuits recueillis par Rae sont confirmés par les recherches ultérieures. Ils décrivent des navires prisonniers des glaces près de l’île du Roi-Guillaume, où l’équipage aurait tenté de survivre en marchant vers le sud. En 1859, une expédition dirigée par Francis Leopold McClintock trouve une note dans un cairn sur l’île du Roi-Guillaume. Cette note, écrite par des membres de l’expédition Franklin, confirme la mort de Sir John en juin 1847 et l’abandon des navires en avril 1848, après un deuxième hiver bloqués par les glaces.
Les découvertes récentes : le renouveau de l’intérêt pour l’expédition Franklin
Il a fallu attendre plus d’un siècle pour faire de nouvelles découvertes significatives concernant l’expédition Franklin. En 2014, cette quête a pris un tournant majeur lorsque Parcs Canada a annoncé la découverte de l’épave du HMS Erebus dans les eaux peu profondes de la rivière Back. Cette découverte, fruit de plusieurs années de recherche intensive, a ravivé l’intérêt pour cette mission tragique.
Deux ans plus tard, en 2016, l’épave du HMS Terror est localisée près de l’île du Roi-Guillaume, en parfait état de conservation. Ces deux découvertes fournissent aux archéologues maritimes des trésors d’informations. Les fouilles sous-marines permettent de récupérer des artefacts, des documents et des échantillons qui offrent un aperçu inédit de la vie à bord et des derniers jours de l’expédition Franklin.
Les avancées technologiques, telles que les drones sous-marins, les scanners 3D et l’analyse des sédiments, ont joué un rôle crucial dans ces découvertes. Les chercheurs, équipés de ces outils innovants, continuent d’explorer les épaves, espérant dénicher des indices sur les décisions prises par l’équipage face à l’adversité, les causes exactes de leur échec et les conditions de leur survie.
Les témoignages des Inuits, souvent négligés par les explorateurs du XIXe siècle, ont également trouvé une nouvelle résonance. Les récits oraux transmis de génération en génération ont été corroborés par les découvertes archéologiques récentes, soulignant l’importance de ces témoignages dans la compréhension de l’expédition Franklin.
Le rôle des Inuits et l’impact culturel de l’expédition Franklin
L’étude de l’expédition Franklin ne serait pas complète sans mentionner l’apport essentiel des Inuits. Ces populations autochtones, qui vivent en harmonie avec le climat rigoureux de l’Arctique, ont non seulement observé les événements tragiques de l’expédition, mais ont aussi aidé les explorateurs et les chercheurs dans leur quête de réponses.
Les Inuits ont fourni des descriptions précises des navires bloqués par les glaces, des camps abandonnés et des groupes de marins errants. Ces récits, initialement méprisés par les Européens, se sont avérés d’une précision inestimable. Ils ont permis de localiser des artefacts et des sites clés, redonnant crédibilité aux traditions orales autochtones.
Au-delà des aspects historiques et archéologiques, l’expédition Franklin a eu un impact culturel profond. Elle a inspiré une multitude d’œuvres littéraires, cinématographiques et artistiques. La série télévisée « The Terror », bien que fictionnelle, a ravivé l’intérêt du grand public pour cette tragédie et a encouragé de nouvelles recherches.
Les navires HMS Erebus et HMS Terror, symboles de l’ingéniosité humaine et de sa confrontation avec les forces de la nature, continuent de fasciner et d’inspirer. L’expédition Franklin est devenue un pont entre le XIXe et le XXIe siècle, rappelant les défis, les échecs et les leçons apprises par l’humanité dans sa quête de découvertes.
Épilogue : Des mystères résolus et des questions persistantes
Les récentes découvertes autour de l’expédition Franklin ont permis de lever une partie du voile sur cette aventure tragique. Les épaves du HMS Erebus et du HMS Terror, les artefacts retrouvés et les récits des Inuits ont apporté des réponses précieuses, tout en soulevant de nouvelles questions.
Le sort des hommes de Franklin, leurs tentatives désespérées de survie, les décisions prises dans des conditions extrêmes, restent en partie un mystère. La communauté de chercheurs continue d’explorer, d’analyser et de débattre pour reconstituer le puzzle complexe de cette expédition.
En conclusion, l’expédition Franklin représente bien plus qu’une simple quête arctique. Elle est le reflet des ambitions, des espoirs et des tragédies humaines face aux forces de la nature. Les découvertes récentes, loin de mettre un point final à cette histoire, ouvrent de nouvelles perspectives de recherche et de compréhension, rappelant l’importance de la persévérance et de la collaboration entre les cultures pour percer les mystères du passé.
L’héritage impérissable de l’expédition Franklin
Au-delà des artefacts et des épaves, l’expédition Franklin laisse un héritage impérissable. Elle nous enseigne l’importance de la préparation, de la résilience et de l’humilité face à la nature. Les découvertes récentes, en redonnant vie à cette histoire, nous rappellent que chaque mystère résolu est une invitation à poser de nouvelles questions et à poursuivre la quête de la connaissance humaine.